montecristo-2Martin Suter est maître dans la création d'une histoire à partir d'un évènement anodin. D'une situation quotidienne comme faire tomber un objet, il bâtit une cascade de situations dans laquelle son héros plonge et se débat, au milieu d’un tourbillon infernal dont il ne sait en sortir. Appliquer cette construction au monde de la finance, suisse au demeurant, serait un pari risqué pour quelqu'un d'autre que Martin Suter.

La fluidité de son style, l'absence de prétention dans la recherche d'imposer au lecteur la description de mécanismes économiques complexes fait que Montecristo se lit avec plaisir et facilité. John Brand, le personnage principal, est plutôt novice, voir réfractaire aux règles qui  se veulent régir notre vie de tous les jours. Mais parce qu'il est curieux, amoureux, et qu’il n'a pas renoncé complètement à quelques idéaux, il approfondit ce que d'autres aurait laisser choir. Et parce qu'il est aussi un peu naïf, surtout quand ça l'arrange, et qu'il aime aussi la reconnaissance et l'argent, il peut franchir quelques limites morales et fermer les yeux. Bref, John Brand est un peu comme nous tous. C'est le tour de force de Martin Suter de nous permettre de nous identifier à son héros, puis de nous entraîner ainsi plus facilement dans la spirale de sa descente aux enfers.

Fiction économique ? Thriller financier ? Toujours plus d'un genre cohabitent chez Martin Suter. Sous le couvert du roman, il aime nous laisser avec quelques questions dérangeantes, auxquelles il n'est pas toujours si simple d'y répondre.

Un roman de la veine de Lila, Lila, de Small World et de La face cachée de la Lune, avec toujours quelques recettes exotiques en prime et quelques verres d'un riesling sylvaner de Thomas Marugg. Tous les héros ne s'appellent pas 007 en sirotant un martini dry !

notice de l'éditeur :

Le zurichois Jonas Brand est reporter vidéo, volontiers pour la presse people. Frôlant la quarantaine, divorcé, il vit bien de son travail même s’il aurait préféré faire de l’investigation ou, mieux, un film qu’il prépare depuis des années qui est une adaptation moderne du Comte de Montecristo. Une de ses déplacements professionnels en font le témoins d’un étrange suicide dans un train allant à Bâle. Au même moment, il remarque que deux billets en sa possession ont exactement le même numéro et son banquier l’assure qu’ils sont tous deux authentique. Aiguillé par son mentor, lui même journaliste économique, et soutenu par sa nouvelle petite amie, Marina, il va hésiter entre la vie paisible d’artiste et une enquête très périlleuse…

Rapide, efficace, plein d’humour et du sens du détail vrai qui font les grands polars, Montecristo fonctionne d’autant mieux que le cadre helvète légèrement ennuyeux rend l’énormité de l’enquête presque plus plausible. Économe de mots comme d’effets, Martin Suter propose encore une fois encore sur un héros poli, agréable et discret, loin de tous les tics et les excès qui peuvent parfois polluer un bon détective de polar. Il ne nous laisse pas trop le temps de nous attacher aux personnages que le complot élimine et reste assez à la superficie des relations humaine pour que seule l’intrigue prime. Une recette de thriller parfait!