La Frontiere

Le dernier volet de la lutte d'Art Keller, fonctionnaire de la DEA, contre les trafiquants de drogue opérant entre le Mexique et les USA, s'achève en 2017 à Washington.

Après les avoir combattu sur le terrain pendant des dizaines d'années, une constatation s'impose : la destruction du Cartel du Sinaloa n'a pas arrêté l'arrivée massive de la drogue sur le territoire américain. La mort d'Adan Barrera, son chef, n'a fait qu'éclore une multitude de factions concurrentes se livrant une guerre sans merci. En plus de leurs armes traditionnelles, ces nouveaux cartels se sont emparés des moyens de communication actuels avec en premier lieu les réseaux sociaux. Ils ont également intégré les meilleurs outils marketing avec la mise sur le marché de nouvelles drogues plus dures, moins chères et rendant les consommateurs plus dépendants.

Aussi les convictions d'Art Keller ont changé. La politique gouvernementale de "guerre contre la drogue" est un échec. Si l'on ne peut pas stopper l'afflux des drogues du Mexique vers les USA, peut-être est-il possible de stopper le flux d'argent issu de leur vente des USA vers le Mexique. Mais s'attaquer aux flux financiers s'est avant tout s'attaquer à ceux qui les contrôlent, à savoir une partie des pouvoirs économiques et politiques du pays, à tous ceux qui font mine d'ignorer la provenance des fonds qui financent une partie croissante de leurs investissements.

Don WINSLOW n'est pas neutre dans ses propos. Il ne se cache pas de viser la famille Trump et ses partisans républicains. Comme dans La Griffe du chien et Cartel, il s'appuie sur une solide documentation pour bâtir son roman. Si les noms sont modifiés, les évènements ne le sont pas : massacre des 43 étudiants mexicains en septembre 2014 par les narco-trafiquants, éclatement du Cartel de Sinaloa et guerre des chefs, relance du marché de l'héroïne associée à des drogues de synthèse comme le terrible fentanyl en tirant partie de la croissance de la vente légale d'opioïdes, investissements immobiliers douteux du gendre de Donald Trump...

La conclusion de Don WINSLOW n'est pas particulièrement optimiste. Les trafiquants de drogue continueront d'alimenter l'inspiration des auteurs de romans policiers et de scénarios pour le cinéma tant que la vente de la drogue ne sera pas légalisée. L'augmentation de la quantité d'argent sale dans l'économie va se poursuivre, tant les collusions entre financiers, hommes politiques et trafiquants est grande. Après la classe politique mexicaine, c'est une partie de la classe politique américaine qui est corrompue.

Cirello, le flic infiltré l'exprime ainsi : "Car tu connais la différence entre un consortium d'investisseurs et un cartel ? Il n'y en a pas."

Notice de l'éditeur

The Border - Don Winslow

Art Keller, ancien agent de la DEA, est recruté par le sénateur républicain O’Brien pour participer à une opération officieuse au Guatemala : aider le cartel de Sinaloa, dont la mainmise sur le Mexique assure un semblant de stabilité à la région, à se débarrasser d’une organisation rivale sanguinaire, Los Zetas. La rencontre organisée entre les dirigeants des deux cartels tourne au bain de sang : les trafiquants s’entretuent et le parrain de Sinaloa disparaît. Keller retourne alors au Mexique, où il retrouve la femme qu’il aime, Marisol. Maire d’une petite ville, celle-ci résiste vaillamment aux cartels, malgré la tentative d’assassinat qui l’a laissée infirme quelques années plus tôt. Quand O’Brien propose à Keller de prendre la tête de la DEA, il y voit l’occasion de lutter contre les organisations qui sèment la mort en Amérique. Il accepte.