Les muselésNous sommes bien loin de la Barcelone de l'Auberge espagnole. L'hiver, la pluie et le froid enveloppent la ville. Les familles expulsées de leur logement et les chômeurs hantent les rues en y cherchant refuge et subsistance, côtoyant des manifestations encadrées par des bataillons de policiers sur-équipés. Parmi les laissés pour compte, quelques-uns réussissent à conserver un foyer sans feu, grâce au versement de quelques allocations et à l'apport de quelques euros apportés par leurs enfants, traquant petits boulots précaires et stages à trois sous.

Ici il y en a qui résistent et d'autres qui pètent les plombs. Pour ces derniers ce n'est pas l'étalage de la richesse étalée devant eux par les élites et l'engagement de procédures de recouvrement pour quelques impayés qui vont les aider à retrouver le droit chemin.

Difficile de rester lucide jusqu'au bout pour l'inspecteur Milo Malart, empêtré dans ses problèmes familiaux et de santé, dans sa colère face à cette misère et ces injustices et face au comportement de sa hiérarchie. Difficile de faire abstraction de cet environnement pour faire main basse sur un ou des criminels qui massacrent à tour de bras humains et canins. Se concentrer sur ce qui fait sa particularité : la possibilité de visualiser ce qu'on fait le ou les assassins, s'apparente de plus en plus de l'exploit.

La noirceur de cette Barcelone aux allures d'une Londres victorienne du temps de Jack L’Éventreur n’obscurcit pas la plume d'Aro SAINZ DE LA MAZA, qui mène avec fluidité et sans fléchir ce récit jusqu'à son terme.

Heureusement, quelques rayons de soleil traversent les nuages, quelques lueurs d'espoir subsistent ça et là : une mer qui, même glaciale, apaise les corps et les âmes, des élans de solidarités et d'amour, des êtres qui relèvent la tête et combattent pour mieux vivre un lendemain.

Notice de l'éditeur

museles-voDans un sous-bois à la lisière de Barcelone, caché sous des feuilles mortes, gît le corps d’une jeune femme à l’aspect en tout point ordinaire, si ce n’est ses ongles, impeccablement manucurés : une étudiante de famille modeste qui finance ses études au service de recouvrement de créances dans un cabinet d’avocats, et arrondit ses fins de mois en faisant l’escort-girl.
Quelques jours plus tard, un des associés du cabinet qui l’employait est retrouvé mort dans son appartement cossu du centre-ville. De la chaîne hifi high-tech s’échappent encore des accords de blues, tandis que le champagne s’évente sur le comptoir de marbre noir.
L’enquête s’annonçait déjà ardue quand un sadique entreprend d’exposer dans les squares, à la vue des enfants, des chiens empalés. Les plaintes fusent et la pression est à son comble pour l’inspecteur Milo, chaque jour un peu plus gagné par la schizophrénie qui a déjà emporté son père et ronge désormais son frère Hugo. Mais ces troubles psychotiques qu’il essaie d’endiguer sont aussi sa plus grande force : une capacité hors pair à se mettre dans la peau des meurtriers.
Le pouvoir politique veut des arrestations pour ramener l’ordre dans la ville et refuse d’entendre les clameurs d’une cohorte d’Indignés pris au collet par le chômage, la corruption et la misère, prêts à tout pour simplement survivre. Mais qui sont les coupables ? Ces victimes ?
Dans une Barcelone en noir et blanc, pétrifiée et transie, asphyxiée par la crise, l’auteur conduit un thriller poignant sur la ligne rouge qui mène au précipice les exclus du système.