Miclan Sebastien Rutes

A partir d’un fait réel, la découverte d'un semi-remorque au Mexique contenant cent cinquante sept cadavres, Sébastien RUTES a construit ce roman peu éloigné de la fiction. S’il fait irrémédiablement penser au salaire de la peur, l’histoire en est cependant bien différente.

Le couple de chauffeurs n’a plus peur depuis longtemps, côtoyant chaque seconde la mort avec son chargement. Pas de risque d'explosion. Le danger vient uniquement de l'extérieur. Chaque arrêt, même ceux autorisés pour faire rapidement le plein d'essence et de vivres, constitue une source potentielle d'ennuis pouvant conduire à une issue dramatique.

Au milieu du désert qu'ils sillonnent toute relation humaine digne de ce nom a disparu. L'anonymat règne. Il n’y a plus de patronymes, les chauffeurs ne s'appelant que par le surnom qu'ils se sont octroyés (le Gros, le Vieux). Indiquer le nom des rares villages traversés n'a plus de sens. Les cadavres, enfermés dans des sacs identiques entassés à l'arrière ont été dépouillés de leur identité, de leur passé, ont été rendus méconnaissables.

Le roman se lit selon l'allure de ce semi-remorque. Comme sa course sans fin, les pensées des deux chauffeurs ne s'arrêtent pas, même durant le sommeil peu récupérateur de l'un quand l'autre conduit. Les phrases suivent le même rythme que les pensées et ne s'accordent pas de pause. Celles-ci ne seront acceptées que lorsque ce véhicule infernal devra faire halte, volontaire aux stations-services ou imposée en cas d'avarie ou de barrages.

Original autant dans son thème que dans sa construction, Mictlan est un roman qui marque. Certains auraient pu en faire un véritable thriller. La voie choisie ici est tout autre. C'est celle de l'expression de la folie et de la démesure humaine, avec malgré tôt une faible lueur d'espoir tant que l'homme arrive encore à penser et que malgré toute sa crainte d'avoir perdu ses sentiments à jamais, ceux-ci trouvent toujours le moyen de refaire surface.

Notice de l'éditeur

À l’approche des élections, le Gouverneur – candidat à sa propre réélection – tente de maquiller l’explosion de la criminalité. Les morgues de l’État débordent de corps anonymes que l’on escamote en les transférant dans un camion frigorifique. Le tombeau roulant est conduit, à travers le désert, par Vieux et Gros, deux hommes au passé sombre que tout oppose. Leur consigne est claire : le camion doit rester en mouvement. Vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Sans autre arrêt autorisé que pour les nécessaires pleins de carburant. Si les deux hommes dérogent à la règle, ils le savent, ils iront rejoindre la cargaison. Partageant la minuscule cabine, se relayant au volant, Vieux et Gros se dévoilent peu à peu l’un à l’autre dans la sécurité relative de leur dépendance mutuelle. La route, semée d’embûches, les conduira-t-elle au légendaire Mictlán, le lieu des morts où les défunts accèdent, enfin, à l’oubli ?