Ils sont rares les auteurs évoquant la guerre d'Algérie. Vincent EJARQUE en fait partie. A l'inverse des américains, les français ont toujours eu du mal à raconter leurs défaites, les périodes sombres de leur histoire.
Dans les années 1980, les cicatrices de ce conflit étaient loin d'être refermées. Des harkis vivaient encore dans des camps, les "pieds noirs" s'intégraient parfois avec difficulté, les réseaux d'anciens membres de l'OAS déclinaient mais existaient toujours et les traumatismes de la guerre hantaient de nombreux esprits. C'est dans cet environnement qu'un ancien appelé, devenu reporter indépendant, atterri dans un journal provincial pour couvrir le meurtre d'une femme et de ses enfants et la disparition de son mari.
Son enquête l'emmènera au coeur d'une grève dure d'une entreprise menacée de fermeture. Il devra s'immerger dans la rédaction du "Courrier", le journal régional, proie de toutes les pressions politiques et financières exercées par les notables de la ville et plonger dans les archives noires des notaires ayant exercé sous le régime de Vichy.
Vincent EJARQUE restitue avec justesse l'ambiance régnante dans cette grande bourgade de province, où les personnalités qui "comptent" se croisent dans leurs cercles fermés. Loin de la capitale, ils édictent leurs lois pour préserver leurs intérêts, quitte à fermer les yeux sur les certaines pratiques.
Pas de temps mort dans ce roman qui mêle avec passion polar et histoire contemporaine.
Notice de l'éditeur
Printemps 1983. Dans le sud-ouest de la France, le chef de la sécurité d'une grosse entreprise industrielle est sauvagement assassiné, avec toute sa famille, par un gang cagoulé.
Cadalen, un journaliste parisien venu enterrer un vieux copain de régiment, est chargé par le patron du quotidien départemental de couvrir cette affaire qui a tout du règlement de comptes. Flanqué d'un reporter-photographe finaud et sans scrupules, Cadalen mène l'enquête dans cette région secouée par la crise économique, où les soubresauts d'une guerre d'Algérie pas si lointaine agitent le camp de harkis qui y a été implanté.
Au fil de ses investigations, le journaliste se heurte à un gendarme énigmatique et déterminé, plonge dans le passé trouble des potentats locaux, essuie des menaces venues de tous bords, encaisse les mauvais coups et tente, tant bien que mal, d'échapper à des souvenirs douloureux.
Roman policier à l'intrigue serrée et à l'humour décapant, peuplé de personnages forts en gueule, sensibles et attachants, « Un Sang d'encre » offre une redoutable peinture sociale d'une époque promise au virage libéral et à la montée de l'extrême droite. C'est aussi l'autopsie d'un lieu, ces petites villes où la roublardise assumée et les trahisons en vase clos transforment le marigot politique en bain de sang.