Traquer, chasser, tuer. La traque conduit inexorablement à la mort lorsque le chasseur ne perd pas la trace de sa proie. Si la proie est un animal, c'est la mort réelle. La traque est provoquée par la faim pour l'animal, et par une certaine conception du sport quand l'homme endosse le rôle de chasseur. Ce dernier ne tue pas l'animal, ce verbe étant trop violent, il le "prélève". Si l'homme est la proie, ce peut être aussi une mort sociale, concrétisée par la crucifixion sur les réseaux dit sociaux, par la mise à l'écart par ses pairs, son entourage ou ou sa hiérarchie professionnelle.
Entre la Namibie et les Pyrénées, cinq personnages, animaux compris, jouent ce rôle : tantôt traqueur, tantôt proie. Quelque soit la latitude les armes employées, fusil, arc, Internet, la méthode est la même : on piste, on identifie et on achève. Parfois quelqu'uns s'en sortent, parviennent à survivre même s'ils n'échappent pas aux blessures physiques et morales infligées, celles-ci les poursuivant jusqu'à la fin de leur existence. Parfois il y a aussi des dommages collatéraux, la chasse étant loin d'être une discipline exacte et le chasseur étant loin d'être un modèle de rigueur.
Le roman de Colin Niel n'est pas pour autant sombre et ne peut pas être assimilé à un simple plaidoyer anti-chasse. Les paysages de Namibie et des Pyrénées l'éclaire, réchauffant l'atmosphère tendue présente à toutes les pages. Notre attention est sollicitée en continu, dans l'attente d'un dénouement que l'on imagine fatal. Le tout est porté par une écriture riche et précise, avec des dialogues au ton juste.
Au départ le doute n'existait pas. Les fauves étaient parfaitement identifiés. A la fin le doute n'existe pas non plus. Les fauves sont justes un peu plus nombreux que ce que l'on croyait.
Notice de l'éditeur
Martin est garde au parc national des Pyrénées. Il travaille notamment au suivi des derniers ours. Mais depuis un an et demi, on n’a plus trouvé la moindre trace de Cannellito, le seul plantigrade avec un peu de sang pyrénéen qui fréquentait encore ces forêts, pas d’empreinte de tout l’hiver, aucun poil sur les centaines d’arbres observés. Martin en est chaque jour plus convaincu : les chasseurs auront eu la peau de l’animal. L’histoire des hommes, n’est-ce pas celle du massacre de la faune sauvage ? Alors, lorsqu’il tombe sur un cliché montrant une jeune femme devant la dépouille d’un lion, arc de chasse en main, il est déterminé à la retrouver et la livrer en pâture à l’opinion publique. Même si d’elle, il ne connaît qu’un pseudonyme sur les réseaux sociaux : Leg Holas. Et rien de ce qui s’est joué, quelques semaines plus tôt, en Afrique.
Entre chasse au fauve et chasse à l’homme, vallée d’Aspe dans les Pyrénées enneigées et désert du Kaokoland en Namibie, Colin Niel tisse une intrigue cruelle où aucun chasseur n’est jamais sûr de sa proie.