Cela pourrait être une histoire vraie. Une histoire comme il s’en est passé des milliers sous la dictature de Staline. Mechtild BORRMANN a choisi d’en faire un roman policier, sous l’angle d’une quête familiale : la recherche du violon du grand père, symbole passé de la gloire d’une famille de musiciens russes.
Mais ce violon n’est pas n’importe lequel. C’est un Stradivarius, objet de toutes les convoitises par excellence.
Pas de titres de symphonies ou de concertos, pas de citation de compositeurs. Les noms qui rythment le livre sont Vorkanta, Alma-Ata ou Karaganda, lieux d’exil, goulags où furent déportés des millions de russes. Ici le lecteur est plongé profondément dans les mécanismes de la répression stalinienne, dans sa violence aveugle issue de la paranoïa d’un homme et d’un système.
Mechtild BORRMANN a réussi à regrouper deux composants. Le violoniste est un polar et un roman historique, où s’entremêlent efficacement intrigues, poursuites et vie quotidienne d’une famille dont les membres ont été séparés, puis expédiés comme travailleurs-bagnards au fond des républiques éloignées de Moscou.
En permanence, nous basculons de l’un à l’autre, ainsi qu’entre deux époques dans l’Union Soviétique – Russie d’après guerre et la nouvelle Allemagne réunifiée. Mais au final, c’est pour constater que peu de choses ont changé. Les fondements du pouvoir sont identiques, les mêmes hommes – ou leurs descendances – occupent des postes similaires. Des patronymes se sont perdus ou ont été rayés, des titres se sont modifiés. Mais l’échiquier de départ est toujours là, et tenter de comprendre comment les pions ont bougé en quarante ans remet en cause trop de situations.
Ce récit habile autour de la véritable prise de contrôle de ce violon, symbole du pouvoir, de l’argent et témoin d’une histoire sordide enfouie au plus profond est bien mené. Même si quelques personnages secondaires mériteraient un peu plus de consistance et si quelques ficelles un peu faciles existent (encore un super héros informaticien !), Le violoniste mérite grandement d’être lu. Quand on le commence, on ne s’en détache pas, jusqu’à la dernière portée. Et l’on se rappelle qu’aux échecs, les russes possèdent souvent plus d’un coup d’avance.
Notice de l'éditeur
Moscou, 1948. Alors que le violoniste virtuose Ilja Grenko quitte la salle de concert sous des tonnerres d’applaudissements, son stradivarius à la main, il est arrêté et conduit à la terrifiante Loubianka, le siège du KGB, sans comprendre ce qu’on lui reproche. Après des jours de privations, d’humiliations et d’interrogatoires, Ilja signe des aveux absurdes qui le condamnent à vingt ans de goulag, après qu’on lui a promis que sa femme Galina et leurs deux très jeunes enfants ne seront pas inquiétés. Mais sa famille est envoyée en exil au bout du monde, dans un enfer à ciel ouvert, le Kazakhstan. Le violon de Grenko d’une valeur inestimable disparaît à jamais. Deux générations et quelques meurtres plus tard, le petit-fils de Ilja, Sasha, se met en quête du stradivarius et apprend les heures les plus sombres de l’histoire de sa famille, broyée par le régime totalitaire et ses hommes de main, indifférents à toute dignité humaine.